GARANTIE DE PAIEMENT

La garantie de paiement peut être sollicitée à tout moment, même après la résiliation du marché dès lors que le montant des travaux n'a pas été intégralement réglé.

Tel est l'apport d'un arrêt rendu par la troisième chambre civile de la Cour de cassation le 18 mai 2017. Dans cette affaire, à l'occasion de la construction d'un immeuble, la société D. a confié le lot gros oeuvre et échafaudage à la société T., devenue la société B. Après résiliation du marché par la société D., la société B. l'a assignée afin d'obtenir la fourniture de la garantie prévue par l'article 1799-1 du Code civil. L'affaire a été portée en cause d'appel et, pour rejeter cette demande, l'arrêt a retenu que la société B. avait mis en demeure le maître de l'ouvrage de fournir une caution bancaire garantissant le paiement de ses travaux postérieurement à la résiliation du marché et que sa demande n'était pas justifiée par une obligation non sérieusement contestable (CA Paris, pôle 1, 3e ch., 8 mars 2016, nº 14/24326). La société B. a formé un pourvoi. Énonçant la solution précitée, la Haute juridiction censure l'arrêt d'appel et considère que l'obligation n'était pas sérieusement contestable.

« Attendu que, pour rejeter cette demande, l'arrêt retient que la société Bâtir construction a mis en demeure le maître d'ouvrage de fournir une caution bancaire garantissant le paiement de ses travaux postérieurement à la résiliation du marché et que sa demande n'est pas justifiée par une obligation non sérieusement contestable ; 
 
Qu'en statuant ainsi, alors que la garantie de paiement peut être sollicitée à tout moment, même après la résiliation du marché dès lors que le montant des travaux n'a pas été intégralement réglé, de sorte que l'obligation n'était pas sérieusement contestable, la cour d'appel a violé les textes susvisés ».

Cass. 3e civ., 18 mai 2017, nº 16-16.795



ARCHITECTE ENTREPRENEUR

Responsabilité. - Responsabilité à l’égard du maître de l’ouvrage. - Garantie décennale. - Action en garantie. - Forclusion. - Inopposabilité. - Faute dolosive. - Définition.

Le constructeur est, nonobstant la forclusion décennale, contractuellement tenu à l’égard du maître de l’ouvrage de sa faute dolosive lorsque, de propos délibéré, même sans intention de nuire, il viole, par dissimulation ou par fraude, ses obligations contractuelles. 
Ne caractérise pas une telle faute la cour d’appel qui retient qu’un constructeur n’a pas pris les précautions élémentaires pour surveiller la totalité de l’exécution des travaux de gros oeuvre qu’il a sous-traités. 

« Attendu que, pour condamner la société d'HLM à verser diverses sommes à M. et Mme X..., l'arrêt retient que cette société, n'ayant pas pris les précautions élémentaires pour surveiller la totalité de l'exécution des travaux de gros-oeuvre qu'elle a sous-traités, a commis, de manière délibérée, une faute dolosive, de nature à engager sa responsabilité contractuelle, nonobstant la forclusion décennale ; 
Qu'en statuant ainsi, par des motifs qui ne suffisent pas à caractériser la faute dolosive du constructeur, la cour d'appel a violé le texte susvisé ».

3e Civ. - 5 janvier 2017. Cassation - n° 15-22.772. - CA Orléans, 11 mai 2015.


PRESCRIPTION CIVILE

Interruption. - Acte interruptif. - Action en justice. - Assignation en référé. - Durée de l’interruption. - Durée de l’instance.

Conformément à l’article 2231 du code civil, l’interruption, par l’assignation en référé, du délai prévu par le premier alinéa de l’article 1648 du même code fait courir un nouveau délai de deux ans à compter de la date du prononcé de l’ordonnance désignant un expert. 
Dès lors, une cour d’appel, qui constate que le délai a commencé à courir le 28 avril 2009, date de l’ordonnance désignant l’expert, pour expirer le 28 avril 2011 et que l’assignation au fond a été délivrée aux vendeurs de l’immeuble les 27 janvier et 9 février 2012, en déduit exactement que l’action en garantie des vices cachés des acquéreurs est prescrite. 

« Mais attendu, d'une part, qu'ayant retenu, à bon droit, que, conformément à l'article 2231 du code civil, l'interruption, par l'assignation en référé, du délai prévu par le premier alinéa de l'article 1648 du même code faisait courir, à compter de la date du prononcé de l'ordonnance désignant un expert, un nouveau délai de deux ans et constaté que ce délai avait commencé à courir le 28 avril 2009, date de cette ordonnance, pour expirer le 28 avril 2011 et que l'assignation au fond avait été délivrée à M. Y... et à Mme Z... les 27 janvier et 9 février 2012, la cour d'appel, devant laquelle il n'était pas soutenu que ce délai ne commençait à courir qu'à compter de la date de dépôt du rapport d'expertise, en a exactement déduit que leur action en garantie des vices cachés était prescrite ».
 
3e Civ. - 5 janvier 2017. Rejet - n° 15-12.605. - CA Aix-en-Provence, 20 novembre 2014.


ARCHITECTE ENTREPRENEUR

Réception de l’ouvrage. - Réception judiciaire. - Condition. - Immeuble habitable. - Constatation suffisante.

Viole l’article 1792-6 du code civil la cour d’appel qui refuse de prononcer la réception judiciaire, alors qu’elle constate que la maison était habitable. 

« Vu l'article 1792-6 du code civil ; 
Attendu que, pour rejeter les demandes de M. et Mme X... fondées sur la réception judiciaire, l'arrêt retient qu'en l'absence d'abandon caractérisé du chantier par la société STAM, en août 2004, et d'achèvement des travaux au même moment, et en raison de la volonté légitime du maître de l'ouvrage de ne pas procéder à la réception dans ces conditions, la réception judiciaire ne peut pas être prononcée au 14 août 2004, peu important que le pavillon, dans son ensemble, ait alors été considéré habitable ; 
Qu'en statuant ainsi, tout en constatant que l'ouvrage était habitable le 14 août 2004, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé le texte susvisé ».

3e Civ. - 24 novembre 2016. Cassation partielle - n° 15-26.090. - CA Paris, 13 mars 2015.



BAIL D’HABITATION 

Bail soumis à la loi du 6 juillet 1989. - Reprise. - Limitations édictées par l’article 15, III. - Domaine d’application. - Exclusion. - Cas. - Congé donné par une société civile immobilière (SCI) familiale au profit de l’un de ses associés. - Offre de relogement. - Nécessité.  
 
Une SCI familiale qui délivre un congé pour reprise du logement au profit de l’un de ses associés à un locataire répondant aux conditions prévues par l’article 15, III, de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 ne peut se prévaloir de la dispense d’offre de relogement prévue par l’article 15, III, alinéa 2, réservée au bailleur personne physique. 

« Mais attendu qu'ayant exactement retenu que la bailleresse, personne morale, ne pouvait se prévaloir au profit de l'un de ses associés de la dispense d'offre de relogement réservée par l'article 15-III de la loi du 6 juillet 1989 au bailleur personne physique et constaté que la locataire, qui était âgée de plus de 70 ans et dont les ressources étaient inférieures à une fois et demie le montant annuel du salaire minimum de croissance, n'avait bénéficié d'aucune offre de relogement, la cour d'appel a déduit, à bon droit, de ces seuls motifs, que les congés étaient irréguliers et devaient être annulés ; 
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ».
 
3e Civ. - 7 juillet 2016. Rejet - n° 14-29.148. - CA Aix-en-Provence, 27 mai 2014.